Contexte
La butte du Hutrel, située sur les hautes terrasses alluviales de la Seine, présente une imbrication rare de milieux calcicoles (terrain calcaire) et acidophiles. Le site, d’une superficie de 6,7 hectares, a été acquis en 2005 par le Conseil général des Yvelines au titre de sa politique des espaces naturels sensibles. Cet espace est répertorié en ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt Écologique Floristique et Faunistique) de type I et est inscrit au réseau Natura 2000 au sein du site « Coteaux et boucles de la Seine » pour la présence de formations végétales à forte valeur patrimoniale. Par ailleurs, la butte du Hutrel se trouve dans le périmètre du Parc Naturel Régional du Vexin Français.
La variété d’habitats présents sur le site est favorable à l’implantation d’une faune très riche notamment du point de vue des insectes. Ainsi, le site héberge des libellules, sauterelles, mais aussi des oiseaux et des plantes en voie de régression et protégés au niveau régional.
De manière générale, les milieux ouverts tels que les pelouses calcicoles sont aujourd’hui en voie de régression du fait notamment de la déprise agricole. Autrefois maintenues ouvertes, en particulier par le pâturage, les prairies non entretenues s’enfrichent et se reboisent au détriment de la faune et de la flore inféodées à ce type de milieu.
L’acquisition de la butte du Hutrel par le Département en 2005 a permis de mettre en œuvre une gestion écologique qui vise notamment à restaurer les prairies calcicoles et à préserver le riche patrimoine écologique qu’elles hébergent.
Présentation du projet
Études préalables à l’élaboration du plan de gestion
Suite à l’acquisition de la butte du Hutrel par le Conseil général, un diagnostic écologique a été réalisé par des bureaux d’études afin de révéler la diversité biologique présente. Cette étude a permis de cartographier les habitats et d’identifier les espèces patrimoniales hébergées par le site. À partir de ce diagnostic, les actions de gestion ont pu être hiérarchisées et un calendrier d’interventions a été élaboré.
La réalisation des travaux de restauration
- Avant toute opération, les zones les plus fragiles ont été balisées afin qu’elles ne soient pas endommagées lors des interventions. La protection du site a été renforcée par des mesures préconisées dans le cahier des charges. Ainsi, aucun engin lourd n’a été utilisé et les coupes ont été effectuées de façon manuelle. En outre, les huiles employées pour le fonctionnement des tronçonneuses étaient de nature biologique.
- Les premiers travaux, destinés à éradiquer les espèces invasives, ont été opérés en deux temps. Les arbres et les arbustes ont été abattus et, lorsque cela a été possible, ils ont été arrachés afin d’éviter qu’ils rejettent. Puis, les produits de coupe de diamètre important ont été évacués vers une filière de traitement de déchets verts agréée, les autres ont été brûlés sur des places à feu hors du site. Il est en effet nécessaire de ne pas laisser les rémanents sur place pour ne pas modifier les caractéristiques du milieu, un enrichissement du sol risquant d’accélérer la colonisation des pelouses par les ligneux (arbres et arbustes).
- La première intervention a eu pour objectif de contrôler la colonisation du site par les espèces végétales exotiques envahissantes telles que le Cytise. En effet, la prolifération de telles espèces peut nuire au point d’amoindrir la diversité biologique d’un espace naturel. Ainsi, l’élimination des arbres et arbustes invasifs a permis de favoriser le développement d’espèces patrimoniales adaptées aux sols calcaires. Ces travaux sont les premiers d’un ensemble d’actions décrites dans le plan de gestion. La réalisation complète de ce programme d’action doit aboutir à un bon état de conservation du milieu.
La poursuite des travaux dans le cadre du plan de gestion
La butte du Hutrel est composée d’une mosaïque d’habitats très variée : pelouses sèches, boisements mixtes, fruticées, friches et zones humides. C’est pourquoi les actions de gestion portent sur l’ensemble des enjeux écologiques révélés par les études réalisées :
- la gestion des ligneux : des travaux d’abattage des pins sylvestres et des genévriers seront effectués afin de limiter leur recouvrement et de maintenir ainsi le milieu ouvert ;
- la création de lisières : l’objectif est de développer l’effet d’écotone (zone de transition entre deux éco-systèmes) à l’intérieur des zones arbustives, ces lisières hébergent une part importante de la biodiversité des milieux boisés ;
- l’entretien des zones humides : les actions porteront sur la mise en lumière des mares et le reprofilage de certaines berges. Ces milieux sont favorables en particulier aux libellules et amphibiens ;
- la gestion des stations floristiques : il s’agira de mettre en œuvre des actions qui favoriseront le développement des espèces rares identifiées sur le site ;
- l’entretien de friches post-culturales : les friches seront fauchées afin de les maintenir au stade de prairie. On limitera l’impact des interventions sur la faune, notamment sur les insectes, en opérant de manière partielle et tardive; de plus, les produits de coupe seront exportés pour ne pas enrichir le sol.
- la réalisation d’inventaires faunistiques et floristiques dans le cadre d’un suivi du milieu : ils permettront d’évaluer l’impact des travaux sur la biodiversité et de réactualiser les données sur la faune et la flore.
Un projet en faveur de l’insertion
Les travaux, qui ont duré 15 jours, ont été entièrement confiés à l’entreprise d’insertion Espaces Verts et Environnement qui a recruté pour l’occasion une personne. Devant la qualité du travail, cette personne a été embauchée définitivement par la suite. Le travail d’insertion a donc en l’occurrence porté ses fruits.
Témoignage / Conditions de reproductibilité
Témoignage d’Éliane BELISSONT, Chef du service Patrimoine Naturel au Conseil général des Yvelines
Les travaux d’ouverture des prairies calcicoles sont fréquents dans la gestion des milieux naturels, cependant, d’une prairie calcicole à l’autre, les méthodes d’interventions sont-elles identiques ?
« La fragilité et la complexité des milieux présents sur la butte du Hutrel impliquent la mise en place d’une gestion précise et localisée qui prend en compte les différents enjeux liés à la richesse biologique du site. Dans ce contexte, l’exécution manuelle des travaux répond à une volonté de limiter l’impact des interventions sur le milieu et à une nécessité d’agir « au cas par cas » en ce qui concerne la coupe des ligneux. Une intervention mécanique n’aurait pas pu répondre à de telles exigences. De même, une gestion par pâturage extensif, méthode fréquemment employée pour la gestion des pelouses calcicoles, n’aurait pas été appropriée dans le cas de la butte du Hutrel du fait de la juxtaposition de différents habitats sur de très petites surfaces. Ainsi, alors que les travaux d’ouverture des pelouses calcicoles sont à entreprendre de manière quasi systématique dès que le milieu se referme, la nature et les modalités d’interventions sont à adapter aux spécificités de chaque site. Une dizaine de milieux similaires (prairies calcicoles) et fragilisés ont été identifiés en Vallée de Seine. Il serait envisageable de reproduire les mêmes techniques de gestion. Toutefois, une connaissance plus précise de ces sites est nécessaire afin d’appliquer des méthodes de gestion les plus adaptées.»
Bilan environnemental
- Espèces patrimoniales adaptées aux sols calcaires favorisées
- Bonne conservation du milieu
Bilan économique
Coûts des travaux : 3 800 € H.T.