L’association Action Mopti recevait mardi 6 février à Maurepas Laurent Bigot, le sous-directeur de la cellule Afrique occidentale au Ministère des affaires étrangères, pour aborder la situation de crise au Mali et les possibilités d’en sortir.
Devant un public nombreux, Laurent Bigot est tout d’abord revenu sur les origines de la crise : si l’intervention occidentale en Libye a pu jouer comme un accélérateur (retour de mercenaires dans leurs pays, trafic d’armes), la crise s’explique d’abord par l’incapacité de longue date de l’Etat malien à pacifier ses rapports avec le Nord du pays, et au “pourrissement” de ce même Etat qui s’est effondré à la première secousse. Les causes de la situation actuelle sont donc avant tout internes, et c’est aux Maliens, et non la France, que reviendra la responsabilité de reconstruire leur pays, sans doute à travers un renouveau générationnel des élites politiques. Les pays africains voisins, comme l’Union africaine, seraient les plus à même d’accompagner ce processus, mais leurs réactions trop tardives par rapport à la crise et la timidité de leurs tentatives de médiation montrent que le recours à la solidarité panafricaine est encore une idée à construire.
Sortir de la crise demandera du temps : pour Laurent Bigot, la proposition d’une Conférence nationale faite dès 2012 reste la solution la plus appropriée pour solder le passé et mettre entre les mains des Maliens leur avenir. La reconstruction passera obligatoirement par une redéfinition des rapports entre le Nord et le Sud du pays. Trois voies complémentaires peuvent être envisagées. Tout d’abord, mettre en place un mécanisme de justice de type « vérité et réconciliation », qui devra faire toute la lumière sur les torts partagés entre le Nord et le Sud du pays et apaiser les tensions. Ensuite, un rééquilibrage des programmes économiques de développement qui devra tenir davantage compte des besoins de base des populations du Nord, en dehors de tout critère démographique. Enfin, le renforcement de la décentralisation politique, qui existe dans les textes mais qui ne correspond à aucune réalité faute de ressources suffisantes, et qui favorisera une gouvernance plus proche des aspirations de chacun des territoires.
Pour entamer ce processus, il faudra être vigilant et ne pas réduire la question du Nord à celle des Touaregs : d’autres communautés (songhai, bambara…) vivent aussi dans la partie sahélienne du pays et revendiquent la même considération. Elargir aux besoins de l’ensemble de ces communautés le diagnostic des rapports Nord-Sud sera le moyen le plus sûr de maintenir le dialogue dans un cadre républicain et d’éviter de raviver les clivages ethniques.